Mingqi

Joueuse de cithare chinoise

Han Orientaux, circa 25 –220 après J.C.

Terre cuite grise recouverte d’une patine de fouille calcaire de couleur orangée

46 x 44 cm

Achat Ville de Toulon

Inv. : 2007.0.76

 

Les Mingqi (objets lumineux) sont des statues ou statuettes chinoises en bois ou en terre cuite. Elles furent utilisées dès la période Shang (1570 à 1045 av. J.-C) comme substitut funéraire. Ainsi, on les retrouve dans les tombes et elles étaient considérées comme les compagnons qui accompagnaient le défunt dans son dernier voyage vers l’immortalité. Elles étaient disposées dans des niches creusées au sein de la chambre funéraire.

Les Mingqi les plus connues demeurent l’armée de terre cuite exhumée à Xi’an dans le mausolée du premier empereur chinois Qin Shi Huang (259 à 210 av. J.-C.). Grâce à cette découverte archéologique six cents guerriers de terre cuite sont retrouvés en 1974 dans une première fosse.

Sous la dynastie Han,  la réalisation d’armées miniatures sera fréquente. C’est également durant cette période que les thèmes se diversifient : dames de cour, commerçants, acrobates, musiciens, animaux, outils agricoles, imitations de vases rituels… Ces statuettes permettent d’identifier le rôle et l’importance du défunt dans la société chinoise de son époque.

 

La joueuse de cithare

La figurine est en terre cuite de couleur grise. Elle est constituée de deux parties moulées puis assemblées. Les coutures latérales ont été polies  sommairement. La figurine est creuse. La musicienne est assise sur ses jambes repliées. Elles sont suffisamment écartées afin de poser sa cithare. On distingue à l’extrême droite de l’œuvre un support qui sert à reposer et à stabiliser l’instrument.

Sa tenue est constituée de quatre éléments : trois robes et une ceinture. En dessous, elle a un vêtement à col montant à mi-cou. A ce vêtement sont superposées deux robes amples, serrées à la taille par une large ceinture visible dans le dos. Les manches de ces robes sont larges, cela lui permet de bouger aisément les bras et de jouer en toute quiétude. La manche gauche est légèrement montée et laisse donc toute liberté aux doigts qui pincent les cordes. La manche droite recouvre l’avant-bras, elle retombe sur la main posée à plat sur la cithare. Cette position permet à la main de moduler le son en vibrations subtiles. Ici, l’instrument utilisé par la musicienne est un « se », une cithare à caisse longue. Il existe une autre variété, la cithare qin qui elle est à caisse courte. L’instrument est en bois, il comprend de sept à vingt-cinq cordes de soie tendues. Le visage au sourire marqué et la coiffe fleurie sont, à l’inverse de la cithare et du corps, très détaillés. Ces détails sont liés aux concepts musicaux taoïstes de l’époque. 

 

Musique, beauté et philosophie

L’intériorité de l’expression symbolise l’extase et reflète les conceptions musicales du philosophe taoïste Zhuanqzi (IV-IIIe siècles) dont les écrits étaient connus et appréciés sous les Han et dans la région de Sichuan.  La musique faisait partie des plaisirs qui accompagnaient le défunt lors de son dernier voyage. Au- delà de la symbolique taoïste, l’époque des Han apparaît aujourd’hui comme une ère de luxe, où le commerce était florissant. Cette figurine illustre avec raffinement l’organisation des banquets de la haute société.  Les nombreux jongleurs, musiciens, baladins et équilibristes attestent des fastes de ces réjouissances. Durant le festin, ils venaient détendre les convives tous assis sur un coussin sur un siège bas. Ils se devaient d’y paraître arborant un maintien et un costume exactement conforme à leur rang. On peut supposer que ces codes étaient également respectés pour les musiciennes.​

 

Frédéric Pédron – responsable du Musée des Arts Asiatiques

 

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