Clément Massier
Grenouille, 1897
Céramique et glaçure
31x50x65 cm
Musée Jean Aicard-Paulin Bertrand
Inv.: 2012.0.19
Clément Massier (1844, Vallauris – 1917, Golfe Juan), est issu d’une dynastie de potiers installée à Vallauris dès le début du XVIIIe siècle. Il est formé dans l’atelier paternel par un maître potier italien, Gaetano Gandolfi, initiateur de plusieurs techniques faïencières dans le domaine de l’émaillage, qui feront bientôt la renommée de la Maison Massier. Dans ce sens, la poterie utilitaire sera progressivement associée à une création artistique plus originale. Associé à son frère et considéré comme le fondateur de l’industrie céramique moderne de Vallauris à la fin du XIXe siècle, Clément Massier obtiendra rapidement une gloire internationale.
En 1883, son installation à Golfe Juan, sur la route qui relie Monaco, Nice et Cannes, permet à Massier d’atteindre une clientèle de touristes fortunés et de bénéficier de la proximité du chemin de fer pour expédier partout sa production. L’année suivante, 120 ouvriers travaillent déjà au sein de ses ateliers. Un réseau de commerce est alors mis en place grâce à la diffusion de catalogues détaillés en France et à l’étranger. Des points de vente s’ouvrent dans la région mais aussi à Paris, en Allemagne, en Angleterre… En 1887, la Maison Massier fournit la couronne d’Angleterre et les plus grands palaces européens : vases, « amphores », caches pots, appliques et autres objets utilitaires ou décoratifs envahissent le vieux continent. Clément Massier s’impose comme l’un des principaux créateurs de la céramique irisée de la Belle Epoque, également appelée « lustrées» (technique originaire d’Irak vers le IXe siècle, avec glaçure métallique, qui confère à l’objet une surface iridescente). Les reflets métalliques aux nuances transparentes de turquoise deviennent un des repères de la marque.
Clément Massier collabore également avec des artistes. Celui qui a le plus marqué la manufacture est le peintre Lucien Lévy-Dhurmer, qui deviendra directeur artistique de la firme. Grâce à lui, les premières productions de céramiques irisées de Massier sont très influencées par les motifs hispano-mauresques, persans et arabes.
Cette sculpture purement ornementale de Clément Massier est caractéristique de la production animalière du temps et de l’influence « japonisante » sur les artistes et écrivains entre les années 1860 et 1890. On le sait, Le japonisme initie de nouveaux choix esthétiques notamment les éléments naturels : végétaux et animaux. Cette influence est présente dans nombre d’œuvres du céramiste, collectionnées par son ami Jean Aicard. « Quatre ans venaient de suffire au Japon pour attirer toute la clientèle artistique de Paris » écrit Emile Zola dans Au Bonheur des Dames, en 1883.
Si la grenouille est un des animaux familiers de la culture occidentale, elle prend une charge symbolique très forte dans l’art japonais et illustre estampes (en abondance dans l’œuvre d’Hokusai par exemple), rouleaux peints, caricatures, netsuke. La grenouille(Kaeru) est un porte bonheur, elle attire la richesse et symbolise le printemps et le renouveau des cycles de la vie dans de nombreuses œuvres poétiques. Pensons au célèbre haïku du poète Bashō Matsuo (1644 - 1694))
Un vieil étang et
Une grenouille qui plonge,
Le bruit de l'eau.
Faucher Jean- Pascal - responsable du Musée Jean Aicard – Paulin Bertrand