Jean-Baptiste Van Loo
Le bain de Diane, circa1737
Huile sur toile, 102 x 162, 5 cm
Achat avec l’aide du FRAM, 1985
Inv. : 985.7.93
Cette toile fut achetée en 1985 par la Ville avec l’aide du Fonds régional d’acquisition des musées. Ce dispositif, fruit des lois de décentralisation, institué par l’Etat en 1982, permet d’assister financièrement les établissements recevant l’appellation « musée de France » dans leur politique d’enrichissement des collections.
D’origine hollandaise, la famille Van Loo se fixe en France dans les années 1660. Louis Abraham Van Loo (1653 – 1712), père de notre artiste, est présent en Provence dès les années 1680. Il participe avec son frère à la décoration de plusieurs navires pour l’arsenal royal de Toulon. Il se marie à Aix en 1683 avec la fille du sculpteur Jacques Fossé. C’est donc au cœur d’une véritable dynastie d’artistes que naît l’année suivante Jean-Baptiste. Il sera bien entendu initié à la peinture par son père. On le retrouve à Toulon entre 1706 -1707. Il y étudie les œuvres de Pierre Puget, réalise quelques portraits et épouse Marguerite Le Brun, fille d’un avocat de la ville. Fixé un temps dans sa ville natale, il travaille pour la famille Lenfant, qui l’introduit auprès de la cour de Monaco. Sa réputation étant installée il se rend ensuite à la cour de Turin et devient le protégé du fastueux prince Victor-Amédée de Carignan, cousin et gendre du Roi Victor-Amédée de Savoie. Carignan ira jusqu’à financer le séjour romain du peintre, en vue de son perfectionnement. Exilé en France en 1718, le prince y attire son artiste fétiche deux ans plus tard et l’installe au sein même de son hôtel particulier parisien. Jean-Baptiste devient alors l’un des peintres favoris du Régent. Louis XV l’admire également et lui passera commande de deux portraits en pied (1724 et 1727). Il est agréé puis reçu à l’Académie Royale de peinture successivement en 1722 et 1731. Puis, on le retrouve à Londres entre 1738 et 1742. Il se retire ensuite définitivement à Aix où il était propriétaire du délicieux pavillon Vendôme. Jean-Baptiste aura eu aussi la belle tâche dans sa carrière de former son jeune et très talentueux frère Charles-André (dit Carle), adulé par madame de Pompadour, ainsi que ses deux fils Louis-Michel, devenu premier peintre du Roi d’Espagne et Charles-Amédée, qui sera celui du Roi de Prusse.
Le bain de Diane du Musée de Toulon a été peint pour le prince de Carignan et exposé au Salon de 1737 où l’artiste essaie de reconquérir une notoriété un peu en berne, face aux succès de plus en plus grand de son frère Carle ou encore d’un François Boucher, nouvelles gloires du goût rocaille triomphant. Le thème mythologique choisi est tout à fait en accord avec les nouveaux codes en vigueur. Dès la fin du XVIIe siècle, autour de Charles de la Fosse, la peinture d’Histoire, ou de Grand Genre, avait pris un tournant moins emphatique, traitant de sujets plus légers. Les exploits d’un Alexandre le Grand avaient été remplacés par des sujets plus galants inspirés des amours des dieux. Ici, La source iconographique est à chercher au Livre III des Métamorphoses d’Ovide.
Au petit matin, après une équipée nocturne vouée à la capture d’un gibier abondant, Diane, déesse lunaire de la chasse, prend un repos bien mérité. Entourée de ses virginales compagnes, la chaste déesse s’est réfugiée en toute discrétion dans la grotte où coule la source Gargaphie. Là, à l’abri des regards indiscrets, la joyeuse assemblée se baigne, alors que Diane, à peine sortie de l’onde, picore nonchalamment quelques fruits. Mais ne nous y trompons pas. Un drame s’annonce ! Alors qu’au loin le jour pointe et que les dernières nymphes accourent avec leurs chiens dans la caverne, l’une d’entre elle, au centre, drapée de bleu, pointe du doigt un danger imminent et invisible à nos yeux. Ce hors-champ subtil permet au lecteur d’Ovide de comprendre que le jeune Actéon approche en toute innocence de ce lieu sacré où nul mortel ne peut entrer et contempler la nudité de la déesse sans en être maudit à jamais. On l’aura compris, si le sujet fait appel à une certaine érudition, la tableau est ici prétexte à exposer la variété des grâces et la sensualité des corps féminins. La palette chaude, délicate et nuancée des chairs contraste avec celle plus froide de la grotte servant d’écrin. Tout comme la douce volupté du premier plan s’oppose à l’agitation du second.
Rémy Kerténian – directeur des affaires culturelles