(Marseille, circa 1630 – id. 1705)

Meiffren  Conte

Vases en métal ciselé et riches étoffes, fin du XVIIe siècle

98x124cm

Ancien fonds de la Ville

Inv. : 956.12.1.

 

Meiffren Conte (ou Comte connu également sous le nom d’Ephren Leconte) issu d’une vieille famille marseillaise, se forme à Aix dans l’atelier de son beau-frère d’origine allemande Rodolphe Ziegler. Ce dernier, fixé dans la capitale provençale en 1653, participera à la décoration de demeures aristocratiques. Meiffren semble également compléter sa formation à Rome où il aurait été durablement influencé par la peinture de Francesco Fievarino. Il s’adonne à plusieurs genres picturaux (peinture d’Histoire, portrait), mais acquiert rapidement une reconnaissance pour ses natures mortes.

On le retrouve à Paris entre 1671 et 1675. Il fréquente principalement le milieu des artistes et artisans employés à la manufacture royale des Gobelins. Là, en contact avec l’excellence du grand goût français, il peut contempler toutes les merveilles qui se retrouveront plus tard dans son œuvre.  De retour à Marseille il est nommé maître peintre des galères du Roi et conserve cette charge jusqu’à 1693. Il enseigne le dessin aux officiers et décore les chambres de parade des vaisseaux. Michel Serre, dont le Musée de Toulon possède deux toiles et célèbre pour ses toiles sur la peste de 1720, lui succèdera à cette charge.

La toile du musée de Toulon est tout à fait emblématique de son œuvre, tout comme de l’évolution de la nature morte sous Louis XIV. D’abord intime, contemplatif, appelant à la vie silencieuse et aux vanités de l’existence terrestres, le genre, jugé mineur, c’était incarné un temps dans la personne du génial Lubin Baugin (1612 – 1663). Mais, avec les fastes nouveaux de la jeune cour royale et la création de la manufacture des Gobelins (1662) sous la houlette de Charles Lebrun, premier peintre du Roi, la nature morte devient opulente, décorative, théâtrale. L’exemple, qui vient encore de la Hollande et de l’Italie méridionale, permet d’intégrer des objets de plus en plus luxueux afin de flatter tout autant l’égo que les intérieurs des riches commanditaires. Parmi les meilleurs représentants de ce nouveau genre on peut citer Jean-Baptiste Monnoyer et son élève Blin de Fontenay.

Ici, dans un amoncellement baroque, de somptueux tissus brodés d’or et d’argent recouvrent en partie la table au plateau de marbre et servent d’écrin à de magnifiques pièces d’orfèvrerie : une aiguière centrale, une autre en second plan, une boite précieuse et une fontaine renversée. A l’arrière on devine aussi un vase de porphyre. On le sait, durant son séjour parisien, Meiffren Conte a pu admirer les pièces de  mobilier d’argent et d’orfèvrerie réalisées pour Louis XIV. Il faut aussi rappeler que ces modèles étaient diffusés vers la province par le dessin et la gravure. « Mais sa fantaisie l’a conduit à multiplier les assemblages composites de cols, panses et pieds réalisés à partir d’objets ayant réellement existé » (Thierry Bajou). Dans ce sens, certaines variations sont toujours présentées sous le même angle. Pensons par exemple au cortège militaire en relief sur la grande aiguière, que l’on retrouve sur deux toiles de l’artiste, l’une au Musée de Valenciennes l’autre à la Staatliche Kunsthalle de Karsruhe. Dans tableau du Musée de Toulon nous pouvons admirer tous les éléments, qui font le succès des natures mortes d’apparat de la seconde moitié du XVIIe siècle en France et en particulier de Meiffren Conte : rendu précis des matières, éclats de lumière sur l’argenterie, doux clair obscur accentuant une sorte de monumentalité grandiose dans un désordre factice. Cette profusion ornementale insiste volontairement sur la virtuosité technique du maître.

Rémy Kerténian – Directeur des Affaires Culturelles

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